Brain Damage meets Harrison Stafford

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BRAIN DAMAGE – Dub since 99

Avec déjà 12 albums à son actif, Martin Nathan multiplie depuis bientôt 20 ans les propositions artistiques les plus diverses sous le nom de Brain Damage. Tour à tour sombre, atmosphérique, revendicatif ou poétique, son univers semble être en perpétuel mouvement, constituant sans doute l’une des clés de la longévité de son projet.

Considéré comme l’un des fondateurs de la scène dub en France, il y crée dès 1999 le premier live machine du genre et établit rapidement des connections avec certains des maîtres du style en Angleterre (Zion Train, Alpha & Omega, The Disciples). En 2002 et 2004, accompagné du bassiste Raphaël Talis, il produit ses deux premiers albums sur le mythique label parisien Hammerbass, avant de rejoindre en 2006 l’écurie Jarring Effects pour une trilogie expérimentale et conceptuelle réalisée en collaboration avec une pléiade d’artistes internationaux (Black Sifichi, Mark Stewart, Hakim Bey). Il s’affranchit alors franchement des codes du genre dans lequel on l’avait peut-être catalogué un peu rapidement.

En 2011, le départ de son acolyte marque le début d’une nouvelle ère pour le projet, qui devient plus que jamais polymorphe. Martin Nathan alterne alors les collaborations (High Tone, Vibronics, Sir Jean) avec ses travaux en solo le rapprochant toujours plus des sources mêmes de son style de prédilection. En 2015, la réalisation en Jamaïque de la majeure partie du projet « Talk the talk / Walk the walk », en compagnie d’icônes comme Horace Andy, Willi Williams, Winston Mc Anuff, Kiddus I et Ras Michael semble en témoigner. En 2017, le producteur se tourne cette fois ci vers les États- Unis, pour une collaboration hors-norme avec Harrison Stafford, chanteur et leader charismatique du légendaire groupe Groundation, dans l’intention de casser une nouvelle fois les codes, et une volonté de décloisonnement des styles et des écoles, parfois enfermés dans leurs orthodoxies. Au fil de toutes ces années, il a su se forger une solide réputation internationale, cultivant avec talent une certaine dichotomie entre ses sessions de studio souvent cérébrales, et des centaines de prestations live, toujours explosives. En France, de part son passif et sa capacité à se renouveler, Brain Damage apparaît désormais comme le trait d’union entre la scène qu’il a contribué à créer il y a bientôt 20 ans, et les nouveaux leaders d’un dub rajeuni, plus synthétique et frontal.

HARRISON STAFFORD – From Groundation

Harrison Todd Stafford est né le 26 novembre 1977 et a grandi à Pleasanton, une ville de la banlieue est de San Francisco aux Etats-Unis. Il fréquente l’école publique mais aussi la synagogue où il étudie la Torah et apprend l’hébreu. La musique tient également une place particulière dans sa famille : son père est pianiste de jazz et son frère passe son temps à écouter Bob Marley et Peter Tosh. Harrison Stafford développe très jeune une passion pour le rastafarisme, les rythmes et la culture de la diaspora africaine.

Il découvre la Jamaïque à̀ l’adolescence et rencontre l’un des piliers du mouvement rasta, Mortimer Planno. Après le lycée, Harrison Stafford étudie le jazz à la Sonoma State University où̀ il fait la connaissance de Marcus Urani et de Ryan Newman. Ensemble, ils forment le groupe de fusion reggae Groundation en 1998. Ils sont rejoints par d’autres musiciens au fil des années pour former un groupe de neuf membres au total. Leur premier album, Young Tree, sort en 1999. A partir de leur deuxième album, Each One Teach One publié en 2001, le groupe prend l’habitude d’accueillir des légendes du reggae sur leurs disques. Dans le même temps, Harrison Stafford créé un cours sur l’histoire du reggae qu’il donne dans son ancienne université. Le succès d’estime arrive en France avec Hebron’s Gate, troisième album du groupe en juillet 2003 avant d’exploser avec We Free Again l’année suivante. Avec les deux autres membres fondateurs de Groundation, il enregistre Rockamovya en 2008, un projet influencé par le jazz sur lequel on retrouve également Will Bernard et Leroy « Horsemouth » Wallace. Harrison ‘Professor’ Stafford commence à travailler l’année suivante sur le documentaire Holding On to Jah au casting exceptionnel. On retrouve Leroy Wallace sur le premier album solo d’Harrison Stafford, Madness, qu’il publie en 2011 sous le pseudo de Professor. Un surnom donné par les Jamaïcains dont certaines légendes se retrouvent invitées ici, comme le bassiste d’Israel Vibration et fondateur des Roots Radics, Errol ‘Flabba’ Holt. L’album, qui délivre un message de paix universel, a été écrit après un long voyage en Israël et en Palestine. En 2012, Groundation publie un septième album, Building an Ark tandis que Professor sort Throw Down Your Arms, album live qui reprend la structure de Madness. On le retrouve en solo quatre ans plus tard pour l’album One Dance, du moins pour la forme, car il est entouré des musiciens qui l’accompagnent pour son projet parallèle, Professor. Toute l’équipe s’est offert pour l’occasion un pèlerinage en Jamaïque et en est revenu avec ce témoignage ensoleillé et technique.

BRAIN DAMAGE meets HARRISON STAFFORD
Liberation Time

Pour appréhender la genèse de ce nouveau projet, surprenant de prime abord, il faut sans doute se pencher sur ce que ces deux artistes ont en commun, davantage que sur ce qui les différencie. Passés respectivement maîtres internationalement reconnus dans les styles, le reggae et le dub, qu’ils développent parallèlement depuis bientôt 20 ans sans jamais réellement se rencontrer, les deux protagonistes s’évertuent à en bousculer les codes, dans le respect toujours plus grand de leurs origines jamaïquaines. Deux décennies au service d’un combat sans merci contre l’orthodoxie musicale, au profit de métissages, qui ont toujours contribué à̀ faire évoluer les choses de l’histoire de la musique et des arts de manière plus générale. En témoignent la fusion du jazz et des différentes musiques traditionnelles jamaïquaines dans le cas d’Harrison Stafford et notamment de son extraordinaire aventure avec Groundation, ainsi que les innombrables expérimentations de Martin Nathan, au fil de la foisonnante discographie de Brain Damage, aux orientations toujours plus improbables et aventureuses. De cette rencontre inattendue naîtra donc l’album « Liberation Time », qui ravira bon nombre des amateurs des travaux des deux artistes, tant tout ce qui contribue à faire leurs particularités respectives y est représenté. La voix unique d’Harrison Stafford lui sert ici de vecteur pour asséner de manière toujours plus élégante un message fédérateur centré autour de l’auto-émancipation par la musique et sa vision universaliste de la foi rastafarienne. L’écriture et la production de Brain Damage quant à elles apparaissent toujours plus fines et personnelles, intellectualisées mais néanmoins viscérales. Compositions solides, mélodies imparables, effets dub classieux, autant d’éléments qui feront sans doute de « Liberation Time » l’un des projets de collaboration les plus aboutis de l’année.


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